André Marfaing et Wayne Thiebaud. Suite en Fa mineur

« J’ai été heureux de voir comment une promenade faite sur une falaise pouvait être traduite sans qu’il fût question de la falaise… »  A. Marfaing
 

Il n’y a aucun rapport entre Marfaing et Thiebaud, mais, en regardant une image d’un tableau du premier, je pense à l’une du second. Voici :    

André Marfaing, “Composition”, 1978, peinture : encre, 64.5 x 50 cm

 

Wayne Thiebaud, “Road Through”, 1983, oil on canvas, 24 x 29 7/8 inches, private Collection © Wayne Thiebaud / Licensed by VAGA at ARS, New York

Aucun rapport, et c’est pourtant le même tableau. Dans l’idée. Quelle est cette idée ? C’est celle de l’Élévation. En dehors de cela, évidemment, ce n’est pas le même tableau. Alors à quoi sert-il de les mettre en regard ? Je viens de le dire : à suggérer l’idée de l’élévation. C’est tout simple, mais cela le devient moins quand on se demande combien de tableaux pourrait suggérer une idée semblable… Allez, cherchez ! Bien. Regardez le tableau de Thiebeaud ; il est complètement irréaliste, bien qu’il entende décrire une situation réelle ; une route au milieu d’un col. Mais, vu l’orientation, on est plutôt sur un “roller-coster” que sur une “county highway”. Et je ne parle pas même des couleurs du paysage, totalement malades (“malade” au sens optique, pas au sens de “dingue”). Certes, chez Marfaing, cette sorte de T pourrait marquer une issue bouchée ; mais je ne crois pas

Et pourquoi cela, mon ami ? Parce qu’il y a le dégagement, au dessus, du blanc, qui, auparavant, crevassait dans le bas…

Mais au fait, est-ce du blanc ou de la lumière ? Marfaing :« Les autres disent que je peins en noir et blanc. Ne voient-ils autre chose ? »  Si, ici, le blanc est de la lumière, alors le noir ne serait pas du noir ? Le noir n’en serait pas ? Si l’on fait attention, on distingue des nuances dans ce travail à l’encre, des estompages ; c’est une matière sensible, comme est sensible le paysage de Thiebeaud. Mais parfois l’image écrase tout, on ne se rend pas compte de la puissance du tableau, et tel est le cas avec “Compostion”, montré ici d’une manière plus véridique et palpable (sur le site Artsper) :

La chromie tire trop sur le jaune, mais on se rend compte tout de même à quel point ce grand rectangle blanc est éclatant ; comme si, littéralement, le peintre avait découpé la toile, laissant jaillir le blanc du mur. Essayons de la retravailler avec deux-trois curseurs…

Cela semble plus probable, plus réaliste, car il est bien certain qu’il n’y a pas de jaune dans cette “Composition”. Ce tableau est vendu au prix de 30 000 €. Si vous ne savez pas quoi faire de votre argent et que vous souhaitez investir (Hou le vilain mot !)… Je le signale sans plaisanter, car la cote de Marfaing ne cesse de grimper ; tranquillement, mais sûrement …

 

Léon Mychkine

écrivain, Docteur en philosophie, chercheur indépendant, critique d’art, membre de l’AICA France

 

 

 


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