Corruption des âmes ou gâtisme en art, le cas Roberta Smith

Il y a quelques temps, la critique d’art du The New York Times et “Lecturer on contemporary art”, Roberta Smith, a viré sa cuti sur fond de mea culpa relativement à la peinture de Cecily Brown, qu’elle avait totalement atomisé 21 janvier 2000 dans The New Yorker. Las !, dans son propre journal, The New York Times du 13 avril 2023, Brown redevient, par le clavier de Smith, une peintresse remarquable (j’y reviendrai une autre fois); ce qui, l’âge venu, n’est pas nécessairement pour autant vrai. Dans un ‘post’ Instagram d’artspace et skowheganart, du 07 octobre dernier, on peut lire une récente déclaration de Smith :

Tant qu’il y aura des artistes comme Henry Taylor, la peinture ne risque pas de mourir.

J’avoue me dire que si Henry Taylor est peintre, je dois, sans même le savoir à mon insu, être le frère jumeau de Patrick Galen Dempsey. La cruelle ironie, avec le gâtisme, ou l’abandon de toute éthique, ce qui revient au même (suivant les âges) c’est qu’avec Taylor, s’il s’en agit vraiment, i.e., la peinture est morte. Je ne vais pas développer plus avant le constat, il suffit, oserai-je dire, de regarder. Mais, soyons honnêtes, l’image du post Instagram (non de mon fait), est une capture restreinte, qui, dans toute sa pleine taille, redonne toute sa vraie force dramatique à cette croûte : 


artspace 2 sem Artspace and @phaidonpress, in partnership with @skowheganart, are pleased to announce a new limited-edition silkscreen titled ‘Portrait of Andy Robert’ (2024) by preeminent contemporary artist @henrytaylorart. Tap to buy now. Taylor is known for creating empathetic portraits that present holistic, complex, and deeply human narratives. ‘It’s about respect because I respect these people. It’s a two-dimensional surface, but they are really three-dimensional beings.’

Artspace dixit

Taylor est connu pour créer des portraits empathiques qui présentent des récits holistiques, complexes et profondément humains. « C’est une question de respect, car je respecte ces personnes. C’est une surface bidimensionnelle, mais ce sont vraiment des êtres tridimensionnels.»  

On reconnaît le charabia mainstream ; l’empathie, c’est forcément un plus, et alors, mazette !, un récit holistique, c’est pas mal non plus ! Et, il faut le reconnaître, nous sommes bien heureux d’apprendre que Taylor peint des vrais gens en trois dimensions, le contraire en eut fait un disciple du Henri Poincaré fictionnant, dans La Science et l’Hypothèse (1902) :

LA GÉOMÉTRIE DE RIEMANN. – Imaginons un monde uniquement peuplé d’êtres dénués d’épaisseur ; et supposons que ces animaux «infiniment plats »soient tous dans un même plan et n’en puissent sortir. Admettons de plus que ce monde soit assez éloigné des autres pour être soustrait à leur influence. Pendant que nous sommes en train de faire des hypothèses, il ne nous en coûte pas plus de douer ces êtres de raisonnement et de les croire capables de faire de la géométrie. Dans ce cas, ils n’attribueront certainement à l’espace que deux dimensions. 

Riemann ou pas, Taylor est bien obligé, comme tout peintre, de peindre en deux dimensions. Notez que cela apparaît tellement fort à Madame Smith que cela transfixe ce qui serait mort. Pour ma part, je vous dis que cette chose est totalement inane et nulle et que, justement, si tous les peintres représentaient comme Taylor, alors la peinture serait en bière. 

Le comble du gâtisme et/ou de la corruption des âmes, c’est qu’il ne s’embarrasse ni de la vraisemblance ni de l’origine. Cette image de Taylor est une sérigraphie. Ce n’est donc pas une peinture. Mais qu’à cela ne tienne, sur le site électronique d’Artspace, nous pouvons lire ceci :

Intimement lié à l’histoire de l’art, le travail de Taylor rappelle les peintures provocatrices et transformationnelles d’artistes tels que Philip Guston et Pablo Picasso. 

Nous voilà conquis ! Si le lecteur ne voit pas forcément qui est Guston, Picasso, ça parle ! Bien entendu, Taylor est représenté par une force commerciale à destination des millionnaires ignares et non-éduqués au goût ; Hauser & Wirth. Ça en domestique plus d’un quant à la “critique”; ce avec quoi, de notre côté français, nous sommes bien familiers, quand il s’agit de systématiquement louanger les expositions des milliardaires Arnault et Pinault qui sont, il faut toujours le rappeler, plus obsessionnellement concernés par l’augmentation picsouienne de leur butins que par un véritable amour passionné et désintéressé de l’art.   

Rappelons que de la corruption des âmes dans le monde du journalisme en général et de la “critique” d’art en particulier dans notre bon pays, on en parle : https://art-icle.fr/?s=bourse+commerce, et nous en avons régulièrement les aimables renvois subliminaux, comme ici (“rédacté” par mes soins) : 

 

En Une: “La Chute des étourneaux sans sonnet”, byLeon