Journal #2. Le costume de Jean Castex est-il postmoderne ?

Nous avons pu assister, jeudi 18 mars, à une conférence de presse du Premier Ministre Jean Castex. Ce qui m’intrigue, ici, c’est la façon dont il se tient, et, surtout, son vêtement. Sans plus attendre, une image :

Cette façon de porter une veste trop grande pour sa taille, n’est-ce pas un signe fort envoyé vers la communauté des gens qui ne savent pas s’habiller (bien malgré eux), et, en même temps, un signe vers ceux, humbles, qui n’ont pas toujours les moyens d’acquérir des vêtements à leur taille, et qui doivent se rabattre sur la veste du grand frère, ou bien de récupération ? Cette veste trop grande, c’est, je le crois, un geste d’humilité de la part de notre Premier Ministre. Regardez comment le col remonte bien au dessus de celui de la chemise… C’est étonnant. Mais pas tant que cela, si l’on réfléchit. Cette veste, trop grande, qui remonte, c’est aussi le message que la situation sanitaire nous dépasse. Le discours officiel, supporté toujours par un costume, se dissocie en direct dans sa manifestation phénoménale : la matière est plus grande que la voix (qui porte d’ailleurs plutôt bien chez Castex), et, en tant que telle, elle s’empare elle-même de la fonction cathartique du politique.

Ensuite, voyez cette grande chemise. Elle aussi, déborde le corps du Politique. Un (trop) grand col, des plis successifs, les manches qui semblent jaillir de la veste, et tout cela d’une blancheur immaculée. Cette blancheur, c’est le signe de la virginité politique, en quelque sorte, non pas que Jean Castex soit un débutant, non, mais il faut prendre cet indice chromatique comme une véritable transcendance, entre le corps et le Pouvoir (le fameux bio-pouvoir des écologistes, notamment, et l’on peut aussi penser bien sûr à la soutane blanche du Saint-Père). D’un certain côté, cette blancheur, elle aussi, dépasse le Premier Ministre.

La cravate, quant à elle, est bien visible sous le col de chemise, qu’elle gonfle de son emprise. Cela aussi est éminemment symbolique. Jean Castex est aussi, en quelque sorte, pris à la gorge — paradoxe cruel de la transcendance —, et, par conséquent, c’est le peuple lui aussi qui l’est, de facto ; et rappelons, comme par hasard, que la Covid-19 se manifeste par des problèmes respiratoires ! Mais justement, ce n’est pas un hasard.

Enfin, je crois vraiment que la coiffure de Castex signe son caractère profondément postmoderne, car je vois dans ce petit épis triangulaire sur son crâne un hommage discret à Klaus Nomi. Et c’est donc bien ici que le Premier Ministre parachève son adhésion au postmodernisme: tout comme Nomi, il est déguisé dans quelque chose de trop grand. Ce « trop grand » est l’indice d’une métaphysique supra-vestimentaire ; nous sommes enveloppés toujours par ce qui nous dépasse, la Covid-19, la question de Dieu au parking, et les épis.

Léon Mychkine