On écrit tout et n’importe quoi sur l’art. On pourrait en relever des dizaines d’items, chaque jour. En voici un :
On peut lire cette prose enlevée sur le site Internet du Château de Chambord. Lydie Arickx… Jamais entendu parler. Mais je ne sais pas tout, et suis toujours prompt à chercher, chaque jour, des artistes que je ne connaissais pas (j’y passe des heures). Las ! Je vais vite, comment dire, me heurter à quelque chose. Mais revenons à la lecture apéritive. Arickx est l’une des figures majeures de l’expressionnisme français. De quoi ? Parlons-nous bien de ce courant de peinture qui, au début du XXe siècle, posait déjà problème à Wilhelm Worringer lui-même, à tel point qu’il révoquait le terme dès… 1920 ? Aussi, présenter, en 2021, une ou un artiste comme figure majeure de l’expressionnisme, ça commence mal. C’est comme si on présentait, en 2021, un artiste en disant : c’est la figure majeure du néo-impressionnisme en France. Ça s’annoncerait mal. Mais bon, il faut bien coller une étiquette. Passons. Son œuvre interroge la vie, sous toutes ses formes. Ça, c’est pas banal. Nous voici très curieux, l’esprit tout à l’affût. Le ou les rédacteurs trouvent que cela tombe bien que l’artiste parle autant de la vie, car comment, quand on voit l’escalier à double-révolution du château chambourdin, ne pas évoquer l’hélice ADN ? C’est lumineux ! Non, vous ne voyez pas ? Tout de même, faites-un effort. Non ? Bon!, quelques images :

On a distingué, à ce jour, trois formes principales de l’ADN :

ADN A (les bases nucléiques sont plus inclinées que dans l’ADN B):
ADN Z (plus étroit que l’ADN A et l’ADN B, et caractérisé par une double hélice gauche, contrairement à l’ADN B):
On ne voit pas très bien le rapport avec l’escalier de Chambord, et ce, pour au moins deux raisons. La première, c’est qu’il n’existe pas de brin d’ADN sans “ponts hydrogènes” ou “paires de base”, comme ici :
La seconde raison, c’est qu’il n’existe pas de brin d’ADN seul, sans “implication”, du genre :

Ci-dessus, un exemple d’agrégation entre ADN (en rouge, jaune et bleu foncé) et une protéine. Et cela peut se compliquer graphiquement bien davantage…

Sans vouloir trop insister, il est impossible de comparer l’escalier du Château de Chambord avec la structure de l’ADN. Quand bien même on le voudrait, où sont les “liaisons” entre les deux hélices de l’escalier ? Il n’y en a pas. C’est tout. On se demande quel est l’intérêt de comparer ce qui ne peut l’être… C’est incompréhensible, à moins qu’il ne s’agisse, comme souvent en art, d’apparier des connaissances qui n’ont rien à voir entre elles, dans le seul but de quoi ? flatter son ego ? impressionner le chaland ? Faire genre “on s’y connaît en plein de trucs ?”. Je ne sais pas, mais, ce que je sais, c’est que ces discours hypertrophiés, ronflants, tintinabulants, sont tellement monnaie courante dans la publicité faite autour de l’art contemporain que l’on pourrait ne plus s’en formaliser. Peut-être. Mais, pour ma part, je trouve toujours cela soit : consternant, désolant, ou agaçant. Jamais, cela ne me laisse indifférent. Partant, je ne peux pas rester consterné, sans renvoyer la balle, que peut-être, d’ailleurs, personne ne rattrapera ; mais ça, c’est une autre histoire.
PS. Pour argumenter graphiquement, j’ai eu recours à des pages Wikipédia, qui me semblent les plus accessibles, tant pour le lecteur, que pour ma personne, car, je dois bien l’avouer, dès que j’essaie de comprendre comment fonctionne toute cette merveilleuse alchimie du vivant, je perds très vite pied, tant tout cela est extraordinairement complexe. Une dernière chose : J’eus pu traiter, bien sûr, des autres aspects assez “extravagants” (pour parler comme Kant) de cette notice électronique, mais je puis vous rassurer ; le résultat n’en aurait pas moins ressemblé à ce qu’il est déjà.
En Une/ Molécule d’ADN, Jesper Klausen/Science Photo L/JKU/Science Photo Library via AFP
Léon Mychkine