Une modeste approche sur un dessin de Rembrandt

Rembrandt Harmenszoon van Rijn, “Un paysage d’Hiver”, c. 1649-50, stylo et bistre, lavage sur grisaille, papier, Fogg Art Museum, Cambridge, MA, USA

Rembrandt. Rien que d’écrire ce nom ressortit à quelque chose de quasi sacré. (Vous voyez bien ce que je veux dire, n’écrivant pas pour les mécréants). Regardant ce dessin, on peut penser à quelque chose d’asiatique, non ? Oui. Mais je crois que ce serait une erreur que de le croire. Cependant, est-ce un effet voulu par Rembrandt ? N’est-ce pas possible ? Mais, au premier abord, si l’on suit la légende, il s’agit d’un paysage d’hiver. Demandons-nous ce qui, chaque hiver, dans un temps que beaucoup d’enfants ne connaîtront plus jamais, tombe… Non, pas des grenouilles, mais de la neige. Et c’est donc un paysage enneigé que nous donne à voir Rembrandt. Alors oui, après, c’est vrai, il y a, de sa part, une virtuosité toute musicale à traiter son dessin comme une partition, avec ses noires, ses blanches, et ses valeurs, qui partirait donc depuis la droite, et se verrait vite compromise par l’ensevelissement. L’ensevelissement de quoi ? Du son. On se souvient, pour ceux qui n’en ont pas l’habitude, et qui n’ont pas les moyens d’aller en vacances à la montagne, ou n’y habitant pas, que la neige est une grande pourvoyeuse de silence — excepté quand on marche “dedans”, ce qui provoque un bruit que l’on ne peut évoquer autrement que par l’adjectif « croustillant ». Mais la neige, bien sûr, et entre autres choses, c’est une sorte de pinceau naturel qui procède à des métamorphoses tant microscopiques que géologiques, et c’est bien là que l’on reconnaît sa générosité toute démocratique (William James parle quelque part de la démocratie propre à la nature… il faut que je retrouve cela). De fait, si nous reconnaissons, au second plan, des maisons ; quant au premier, on peut se poser des questions. À droite, supposé-je, une barrière. Oui, mais derrière ? Quel est cette sorte de forme comme un grand N majuscule, et, à sa gauche, cette espèce de croix un peu penchée ? Alors, je vais vous dire ce que je crois deviner : Le grand N, c’est une bonde d’étang, et, à gauche, c’est une voile. Mais, évidemment, je peux me tromper complètement. Ensuite, après l’interruption du trait, (neige ? partie manquante ?), la barrière reprend et nous offre, avec son opposé au bord gauche indistinct, une brève perspective, avec toutefois, et là au loin, je postule encore, un moulin. Après, n’y aurait-il pas, dans ce dessin, et sur le côté gauche et en bas, des esquisses d’animaux ? Mais mon imagination doit me jouer des tours ; ce qui ne serait pas nouveau. Quant à la tonalité jaune or générale du dessin ? Il s’agit sûrement d’une indication temporelle ; c’est un crépuscule. D’où la technique spéciale employée par Rembrandt.

PS. N’ai-je pas oublié quelque chose ? Quel est donc cette petite construction isolée, au milieu, là-bas, à gauche des grands arbres ? Les latrines.

 

Léon Mychkine


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