Nikita Kadan, des armes de terre

Les “experts” disent que Vladimir « retient sa force ». En quelque sorte, il tue, mais il pourrait tuer bien davantage. Faudrait-il lui en savoir gré ? Merci Volodia ? Tuer, ne serait-ce qu’une seule personne, n’est-ce pas déjà de trop ? Bien sûr, « c’est la guerre », et la guerre, ça tue. C’est bête à dire. Et les étasuniens nous ont prévenu : La Russie va envahir l’Ukraine. Mais, est-ce l’âge de Biden ? A-t-on pensé qu’il babillait ? Ils avait raison. Pourquoi ne les a-t-on pas écoutés ? Vendredi 11 février, les Officiels américains ont annoncé qu’une attaque contre l’Ukraine était imminente, la Russie ayant regroupé plus de 100 000 soldats à la frontière. Le 15 février, la Russie a fait semblant de procéder à un retrait ; l’Europe a mordu à l’hameçon, pas Washington. L’Europe était soulagée, comme une dinde qui échappe au nouvel an. Et puis ils ont déboulé. Beaucoup ne sachant pas du tout pourquoi ils en arrivaient là.

Si l’Europe avait écouté Washington, eut-on procédé mieux et plus vite ?

On a dit : « on va vous livrer des avions », des MIG-29 polonais. On a parlé de F-16 étasuniens, mais il faut des mois pour se former. Les MIG-29, les pilotes ukrainiens savent les piloter. Et puis rien. Et Volodymyr Zelinsky s’est agacé, passé une semaine : Où sont les avions ? Et là, l’écho, dans les plaines de l’Europe, a répondu : Tu peux toujours attendre, t’en verras pas une aile. Et puis KFC a fermé à Moscou. L’Europe s’est dégonflée.

Mais, on peut livrer des missiles Javelin antichars et des Stinger antiaériens (170 000 depuis les USA), 30.000 pistolets et 7.000 fusils depuis la République tchèque, 3.000 fusils depuis la Belgique, 2.500 depuis la Finlande, 3.000 mitrailleuses lourdes depuis la Tchéquie, 1000 lance-roquettes antichar, 500 missiles Stinger et neuf obusiers (canon court) depuis Berlin, et tout cela sans être qualifié de cobelligérant, mais donc, pas d’avions ?

Si Vladimir se retient, on en revient aux armes de terre, contre les armes de fer. Certes, les œuvres produites par Kadan sont en fer forgé, mais, dans le rapport de force, le fer se brise comme la terre sous l’aluminium des bombes russes.

Nikita Kadan, “Tiger’s leap”, 2018, Fer forgé. Reconstruction d’armes, fabriquées par les métallurgistes de Gorlovka à partir de leurs instruments pour s’opposer aux cosaques et à la police pendant le soulèvement de Gorlovka. Le soulèvement armé a fait partie de la révolution de 1905 et a marqué un tournant pour le mouvement ouvrier dans le Donbass.

 « L’un des conflits les plus sanglants de la révolution a eu lieu à Gorlovka. Les unités de combat révolutionnaires de la région de Debaltaevo, Enakievo, Ianisovotaia, Avdecvka, et Grishino, augmentèrent grandement avec les groupes de combat de Lugansk, conduits par Klementi Voroshilov, le futur héros de la seconde guerre mondiale et maréchal rouge, qui a gonflé le nombre des rebelles à 4.000, dont une centaine avait des fusils, 500 des revolvers et des fusils de chasse, et le reste était armé de piques de fabrication artisanale, d’armes à feu en plomb et d’outils. Quand cette horde a chargé la gare et les casernes, la garnison s’est enfuie. Les soldats sont revenus le lendemain, 18 décembre, avec des renforts composés de cosaques et de dragons, mettant en déroute les rebelles, tuant environ 200 personnes. Des prises similaires de gares par d’importants groupes eurent lieu tout le long de la ligne avec des résultats similaires. Il est notable que cette zone était l’une des rares régions dans laquelle les paysans ont coopéré avec les ouvriers, ce qui a porté le nombre de rebelles à plusieurs milliers. […] Toutefois, ils étaient trop pauvrement armés pour gagner. Dans le centre de l’Ukraine les bolchéviques et les mencheviks, à Alexsandrovska (aujourd’hui Zaporojie), prirent la gare et l’hôpital. Après un feu nourri et de nombreux lancers de bombes, la gare était reprise le 14 décembre avec la mort de 300 ouvriers, en faisant l’une des classes les plus ensanglantées de la révolution.» (Anthony M. Ivancevich, “The Bolsheviks in the Russian Revolution of 1905”, Thesis, University of Chicago, 1967).

On le voit, les rebelles de Gorlovka n’eurent pas que des piques pour se battre, mais ils ne faisaient pas le poids face au bolchéviques et mencheviks ; face à la Russie. L’histoire se répète, mais, Marx avait tort, pas comme une farce.

Léon Mychkine

 

 


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En direct de Kyiv, avec Nikita Kadan, artiste. P1

Direct from Kyiv, with Nikita Kadan (et al.), artist. P1

 

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