ART-ICLE.FR, the website of Léon Mychkine (Doppelgänger), writer, Doctor of Philosophy, independent researcher, art critic and theorist, member of the International Association of Art Critics (AICA-France).

Qu’est-ce que le réel ? Avec Thomas Demand, et René Descartes. #2

Si nous disons que nous ne pouvons pas faire l’expérience d’une œuvre de Demand (voir #1), cela implique-t-il qu’il ne s’agit donc pas d’un phénomène ? Ce serait absurde si nous en faisions une proposition totale, cependant, il semble que nous ayons affaire, avec Demand, à la possibilité d’une expérience incomplète. Nous ne pouvons avoir qu’une expérience incomplète, car l’objet renvoie à une impossibilité → il désigne & ne désigne pas le (vrai)-réel. Si Demand produisait une œuvre abstraite, ce genre de questions ne feraient guère sens, voire, seraient non-pertinentes. Or, comme par hasard, il existe une petite part d’abstraction pure chez Demand, avec ces patrons, tels celui-ci :                       

Thomas Demand, “Kinglet”, 2020, tirage pigmentaire encadré, 135 x 172 cm,  © Thomas Demand, Adagp, 2023
Thomas Demand, “Grosbeak”, 2020, tirage pigmentaire encadré, 135 x 172 cm,  © Thomas Demand, Adagp, 2023

Dans ces photographies, Demand encourt le risque de la tautologie. En effet, si on reconnaît là des patrons, ils ne renvoient, du point de vue de la matière, qu’à eux-mêmes, ce à quoi ne renvoient pas les autres objets ou lieux traités généralement par Demand. Pourquoi ne renvoient-il qu’à eux-mêmes ? Parce qu’ils pourraient très bien servir en tant que patrons, c’est-à-dire que nous pourrions les utiliser dans le monde réel, ce qui va donc à l’encontre de tous les autres objets, ou espaces, ou végétaux, bref, la classe des objets demandiens (CloD). Notez qu’il est possible que Demand sache parfaitement que cette série de photographies (il y en plusieurs de cette sorte) ne remplit pas ce que j’ai appelé le cahier des charges demandien, qu’elle s’inscrit comme une sorte de clin d’œil, une irruption ; mais ce n’est qu’une hypothèse. Quoiqu’il en soit, cette série n’est pas remarquable.     

Rappel : La photographie demandienne est fictive, elle ne photographie jamais la “vraie” réalité. La réalité, en sa majeure partie, n’est ni faite de carton ni de papier, et c’est pourtant à partir de ces deux matériaux fondateurs que Demand nous invite à croire qu’il s’agit là d’une réalité, reproduite, par la photographie. Il est indispensable, dans la démarche, que Demand nous invite à croire, sinon son œuvre ne renverrait à rien d’autre qu’à elle-même (comme dans les deux photographies ci-dessus); aussi, il a besoin d’établir un va-et-vient entre fiction et réalité, et donc, au bout du compte, d’une re-fictionnalisation du réel et ce, même quand la réalité est fictionnalisé — se projeter dans un événement historique ou un fait divers c’est exercer un certain type de re-fictionnalisation. Il faut alors distinguer entre re-fictionnalisation et fictionnalisation.

La fictionnalisation, c’est le fait de fabriquer une phrase soit pour acheter une baguette soit pour se promener dans les faubourgs de Carthage au temps d’Hamilcar Barca, au IVe BC sous la plume de Flaubert. Quand je dis : (A) « Bonjour madame, une baguette s’il vous plaît », je produis une fiction, une fiction rationnelle. Pourquoi est-ce une fiction ? Parce que la langue n’est pas naturelle, c’est un artefact. Il est trivial de rappeler qu’un enfant sans aucune éducation au langage ne trouvera jamais en lui-même les ressources pour parler. Ajouté à cela, la phrase (A) est rationnelle, car je produis une phrase ad hoc par rapport à l’objet visé. Si je disais, dans la même boulangerie : « Bonjour Madame, je voudrais une clé de 12 », la situation serait absurde, car la boulangerie ne vend pas de clés de 12. Si je lis (B) « C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Halmicar », je suis immédiatement transporté dans une aire géographique et historique qui n’existe plus, cependant que je m’y trouve tout de même, par la pensée, et précisément la fiction littéraire. Il y a cependant un point qu’il faut noter : Tandis que je n’ai pas besoin de croire fictivement à ma propre phrase « Bonjour madame, je voudrais une baguette, s’il vous plaît », il est primordial que se manifeste mon assentiment à croire en ce qu’écrit Flaubert, sinon je n’irai pas plus avant. J’ai parfaitement conscience d’être dans la fiction, comme un voyageur assis confortablement dans un véhicule silencieux et mobile, qui me conduit à une destination inconnue, mais familière, celui de la fiction littéraire. La fiction artistique ainsi (léger) besoin d’un supplément de croyance. 

Certes, certains philosophes, et notamment David Hume (1739-40), a voulu démontrer que la croyance (‘belief’) commence dès la sensation :  

La croyance ou l’assentiment, qui accompagne toujours la mémoire et les sens, n’est rien d’autre que la vivacité des perceptions qu’ils présentent ; et c’est cela seul qui les distingue de l’imagination. Croire, c’est dans ce cas ressentir une impression immédiate des sens, ou une répétition de cette impression dans la mémoire. C’est simplement la force et la vivacité de la perception qui constitue le premier acte du jugement et qui pose les bases du raisonnement, lorsque nous traçons la relation de cause à effet. (Treatise of Human Nature, B.I P.III).

N’allez pas croire que Hume exagère, il a soulevé là une pierre qui n’a jamais, encore aujourd’hui, retrouvé sa place, et il aura fait douter, mieux, réveillé Kant, comme il l’a écrit lui-même, de son « sommeil dogmatique », et produit un nombre incalculable de travaux parmi les philosophes, notamment l’œuvre impressionnante de Fred Dretske (1932-2013). En effet, pour en revenir à Hume : Qui me dit que mon expérience est réelle et véridique ? Pourquoi, quand je rentre dans la boulangerie, suis-je si sûr de voir là, dans le présentoir, de vraies baguettes ? Ce sont peut-être de fausses baguettes, faites en papier, en plâtre, ou en carton ? Qu’en sais-je ? Peut-être que le boulanger aime à décorer son présentoir de fausses baguettes quand il n’en a plus à disposition ? Peut-être que ces pains ressemblent, quant à leurs formes, à celles de baguettes, mais que ce n’en sont pas ? C’est ce genre de question que peut poser un philosophe aujourd’hui, et cela ne traduit en rien une question purement sophistique ou un égarement mental, c’est très perturbant et concerne ce qu’on appelle les modes de connaissance. Ce n’est pas rien. Revenons à Demand. 

La re-fictionnalisation consiste, chez Demand, à reproduire une scène, banale ou historique, non pas pour nous inviter, comme nous le faisons naturellement entre tout sujet percevant et objet perçu, à une connexion mentale “classique” — c-a-d à partir d’un nombre indéterminé parce que non-calculables de processus inter mondains et physico-neuronaux qui semblent toujours fusionner à grande vitesse au point que la conscience que nous en avons dans le temps de cette connexion semble compter en moins d’une seconde — entre représentant et représenté, c’est-à-dire entre le fait (la connexion) et l’objet, comme le produit mentalement, par correspondance, n’importe quelle photographie réaliste. Demand insère un élément sur-fictif, à savoir la “nature” de ses maquettes qui, encore une fois, correspondent “mimétiquement” aux “faits”, et c’est toujours à cela que nous retournons, comme l’oiseau se cogne contre la vitre, à savoir que les maquettes nous obligent à opérer un écart entre représentant et représenté. Peut-être est-il nécessaire de préciser ce que nous entendons par représenté.

Lorsque nous utilisons un nom ou une expression abstraite pour décrire ce que nous voyons, entendons ou ressentons — ce dont nous sommes conscients —, ce qui est décrit est normalement une conscience conceptuelle d’un fait (non spécifié). Ainsi, décrire quelqu’un comme voyant (étant conscient) la différence entre A et B implique que la personne voit (est consciente) qu’ils sont différents. Décrire quelqu’un comme étant conscient de la couleur de sa chemise (bleue) implique qu’il ou elle est conscient(e) que sa chemise est bleue — donc qu’il ou elle représente la couleur d’une certaine manière conceptuelle (comme bleu, la couleur du ciel, etc.) Il serait étrange de décrire une personne comme voyant (donc étant consciente) la couleur de sa chemise si la personne ne savait pas, à un certain niveau conceptuel, quelle était la couleur de la chemise. (Dretske, 1995.)

Quand je vois que Simon porte une chemise bleue, ne s’insère pas dans mon esprit la question de savoir si celle-ci est vraiment bleue, ou bien s’il ne s’agirait pas finalement d’autre chose que d’une chemise… C’est une chemise, et elle est bleue. Il n’y a aucun doute. Ce n’est pas une croyance (‘belief’, chez Hume), c’est un fait. Or voici enfin le mot autour duquel nous tournions sans le savoir depuis le moment où nous avons commencé de rechercher de quoi il était question, quel était le pivot sur lequel est axé la principale force du travail de Demand. Nous l’avons employé, sans l’avoir remarqué, mais le revoilà, à la fois comme fait et verbe : Demand nous fait douter, et le doute produit alors un écart, un écart épistémique, en en passant par un héritage peut-être cartésien, et précisément quand, fameusement, le philosophe regarde par la fenêtre en se demandant si les passants qu’il voit marcher dans la rue ne  seraient pas des spectres : 

… si par hasard je ne regardais d’une fenêtre des hommes qui passent dans la rue, à la vue desquels je ne manque pas de dire que je vois des hommes, tout de même que je dis que je vois de la cire ; et cependant que vois-je de cette fenêtre, sinon des chapeaux et des manteaux, qui peuvent couvrir des spectres ou des hommes feints qui ne se remuent que par ressorts ? (René Descartes, Méditations Métaphysiques, 1641)  

Le doute demandien diffère de celui cartésien, en ce que Demand sait exactement la qualité réelle de la réalité, pour le dire ainsi maladroitement, mais, à vrai dire, tout autant Descartes. Si le philosophe pense vraiment, s’en convainc, que les passants sont des spectres, il va devenir fou. Il ne peut pas accepter qu’il s’agisse de spectres. D’une certaine manière, Descartes joue avec le doute, nous en donnant un exemple acméïque. Demand, lui, nous pousse à douter de ce que nous voyons, sans que nous risquions, bien entendu, d’en perdre la raison. Il nous pousse à douter et ce doute agit exactement comme un coin éclateur entre photographie & réalité. Mais ce doute existe-t-il encore quand nous savons qu’il s’agit de maquettes ? Disons, pour le moment, que le doute imagique provoqué par Demand conduit à la question : « Est-ce que ce que je vois est réel ou non ?» Et cette question indique en quoi la photographie, chez Demand, en sus d’être souvent très belle, voire davantage, est philosophique. Car là encore, la réponse ne va pas de soi. Au second degré de la réalité, celui que j’atteins quand j’ai conscience d’avoir affaire à du papier et du carton, je sais que, malgré tout (deux niveaux de fictionnalisation), ce que je vois est réel, puisqu’il s’agit de papier. Mais, retour premier degré, la réalité n’est pas faite de papier. Or c’est ce premier degré qui permet la fictionnalisation que je vais appeler alors naturelle. Je vois un rideau de douche, un coin de baignoire, de l’eau. Tout cela est naturel. En disant “naturel”, je fais abstraction de la construction neuro-mentale qui a fait tout le travail de reconnaissance pour “moi” et qui n’est pas “moi”, au sens où “je” n’en suis pas responsable et n’ai aucun pouvoir d’y intervenir ou d’en modifier le moindre processus. Ce genre de représentations, donc, Dretske (1997) les nomme “natural representations”, « représentations naturelles » :  

Je pars du principe qu’il existe des fonctions acquises naturellement et, par conséquent, des représentations naturelles. Je n’argumente pas en ce sens, je le suppose. […] Les pensées et les croyances sont classées avec les expériences. C’est correct, dans la mesure où cela va de soi. Les deux sont des formes de représentation naturelle.

Chez Demand, le doute intervient quand, convaincus d’avoir considéré une représentation naturelle — p. ex. des nénuphars — nous nous rendons compte que cette représentation n’est pas si naturelle, elle est donc artificielle, entièrement. On dira : “toute œuvre d’art est artificielle”. Certes. Mais, photographier des nénuphars et en montrer un tirage, est-ce artificiel, dans le sens où ce que nous voyons est la restitution justement d’un espace naturel ? L’adhésion sensitive ou conceptuelle à une œuvre d’art, disons-le, peut se faire “naturellement”, tout aussi naturellement que si nous voyions un “vrai” paysage identique. Si Dretske accorde que pensées et croyances sont des expériences produisant des représentations naturelles, pourquoi, face à une photographie réaliste, ne serions-nous pas dotés d’une même sorte de représentation ? Il en irait différemment si Demand produisait des photographies abstraites, à la Siskind ou Vichniac, ou plus récemment à la Laure Tiberghien ou encore à la Liz Deschenes ; nous ferions face à d’autres problèmes d’interprétation. Mais tel n’est pas le cas.

Thomas Demand, “Pond”, 2020 C-Print / Diasec 200 x 399 cm, Jeu de Paume, Paris, © Céline Lefranc

J’ai vu cette photographie au Musée du Jeu de Paume en mai 2024, et plus je me tenais face à elle, et plus je me suis mis à éprouver un sentiment que je n’ai pas pu identifier autrement que sublime. Bien sûr, il sera difficile d’éprouver ce même sentiment face à une pauvre reproduction sur écran.

Incise. Ce mouvement figural de re-fictionnalisation pourrait-il faire penser à cette opération mentale que nous faisons parfois quand, tout à coup, nous ne croyons plus à la fiction filmique que nous sommes en train de regarder ? Vous voyez, ce moment où nous cessons de croire passivement au jeu des acteurs tout en nous faisant la remarque soit qu’ils jouent mal, soit que c’est mal filmé, ou que, tout à coup, le scénario, décidément, comme on dit, ne “décolle pas” ou ne “tient pas”. Ce moment, qui nous arrive à tous, nous sommes dans la re-fictionnalisation, sauf que, généralement, dans ce cas, nous ne saurions proposer quelque alternative au jeu, n’étant nous-mêmes dans ce cas précis ni acteurs ni scénaristes, et quand bien même, si, pour une fois s’il en est, Amsterdam Vallon (Leonardo DiCaprio), est un piètre acteur face à Daniel Cuttin, aka Bill the Butcher (Daniel Day-Lewis) dans Gangs of New York (Martin Scorcese, 2002), écrasé qu’il se trouve sous le terrible personnage incarné par Day-Lewis. On peut aussi penser à ce fameux moment abyssal où, dans Mullholand Drive (David Lynch, 2001), Diane Selwyn (Naomi Watts), venue à Hollywood pour des castings, se retrouve dans un essai où elle doit embrasser un homme qui pourrait largement être son père, mais l’embrasse si longuement, si langoureusement, dépassant par là les attendus de la scène, qu’elle met tout le monde, participants et spectateurs dans la salle, dans un embarras réel, ce qui n’était pas du tout censé advenir. À ce moment, s’établit une surfictionalisation dans le fictionné, i.e., ce n’est pas moi qui fictionne le film de Lynch, il est déjà “fictionné” pour moi, et jusqu’à cette scène, j’adhérais complètement au jeu et la mise en scène, mais le moment du baiser creuse encore davantage dans la simple fictionnalisation. Il y a un effet-bascule. 

PS. Il est fort probable que Hume ait repéré dans sa lecture de Descartes l’aiguillon du doute, que Descartes aura bien vite signalé autant qu’écarté, mais quand bien même furtif, ce doute, comme des coins enfoncés dans un bois moribond, contribuèrent décisivement à faire éclater l’emprise du religieux sur les individus et à faire émerger le Sujet moderne (les “décoloniaux” sont bien ignares et doublement ingrats à cet endroit). À partir du doute cartésien, Hume aura réouvert la faille du scepticisme, toujours vivace en philosophie de l’esprit contemporaine. Il n’est donc que justice de citer ces passages des Méditations Métaphysiques, de Descartes, écrites en latin en 1641, et traduites en français par Louis Charles d’Albert de Luyne, en 1647. (Descartes aura été échaudé par l’épisode Galilée, ce qui explique pourquoi son Traité de l’homme fut édité posthumément, et peut-être aussi pourquoi il écrivit ses Méditations en latin, c’est-à-dire quelque peu en retrait du commun… Et rappelons que le Discours de la Méthode fut publié, anonymement, à Leyde (Pays-Bas), en 1637. Le philosophe décéda le 11 février 1650, à l’âge de 53 ans).  

Tout ce que j’ai reçu jusqu’à présent pour le plus vrai et assuré, je l’ai appris des sens, ou par les sens : or j’ai quelquefois éprouvé que ces sens étaient trompeurs, et il est de la prudence de ne se fier jamais entièrement à ceux qui nous ont une fois trompés. 

[…]

Mais, encore que les sens nous trompent quelquefois, touchant les choses peu sensibles et fort éloignées, il s’en rencontre peut-être beaucoup d’autres, desquelles on ne peut pas raisonnablement douter, quoique nous les connaissions par leur moyen : par exemple, que je sois ici, assis auprès du feu, vêtu d’une robe de chambre, ayant ce papier entre les mains, et autres choses de cette nature. Et comment est-ce que je pourrais nier que ces mains et ce corps-ci soient à moi ? si ce n’est peut-être que je me compare à ces insensés, de qui le cerveau est tellement troublé et offusqué par les noires vapeurs de la bile, qu’ils assurent constamment qu’ils sont des rois, lorsqu’ils sont très pauvres ; qu’ils sont vêtus d’or et de pourpre, lorsqu’ils sont tout nus ; ou s’imaginent être des cruches, ou avoir un corps de verre.

 

Refs Roxana Marcosi, “Paper Moon”, In Roxana Marcosi (Ed), Thomas Demand, MoMa, 2005 /// Kevin Greenberg, “A short interview with artist Thomas Demand”, Pin-Up /// Fred Dretske, Naturalizing the Mind, the MIT Press, 1997 // David Hume, Treatise of Human Nature, 2.Vols, The Clarendon Edition of the Works of David Hume, Oxford University Press, 2011 /// René Descartes, Méditations Métaphysiques, Quadrige PUF, 1988 

Qu’est-ce que le réel ? Avec Thomas Demand, et le “mythe du donné”. #1

Léon Mychkine

écrivain, Docteur en Philosophie, chercheur indépendant, critique d’art, membre de l’AICA-France

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