Jeff Koons dit n’importe quoi. La preuve en images

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La parole artistique n’a jamais consisté a dire ou narrer n’importe quoi, le fameux “anything goes” de Cole Porter, appliqué aux arts plastiques, et dont se seront servis abondamment les clowns de service, tels Toroni, Ben, Hubault, et… Koons. Cette parole a atteint, je crois, son paroxysme avec celle de Jeff Koons, qui, principalement, consiste à dire absolument n’importe quoi. Non seulement les œuvres de Koons auront porté atteinte à l’intégrité de l’art contemporain, et de l’art tout court, mais en sus, sa faconde et la puissance de frappe qui l’accompagne (prestige mondial, hyper bankable, millionnaire de son état — fortune estimée à 250 $M, appuyé et surcoté par l’amour éternel d’un milliardaire) n’auront pas arrangé un domaine propice, justement, à une perception du “n’importe quoi”. J’ai déjà pointé (ici, ici, et ici, pour exemples) le discours amphigourique ou ridicule de certaines instances (Institutions, galeries, etc), mais là, Koons nous offre le Caviar du N’importe Quoi (NQ), un cas d’école. Certes, de nombreuses personnes, si on leur demande leur avis sur Koons, diront que c’est n’importe quoi, que c’est de la m…, etc. Soit. Mais quoi d’autre ? Qui y a-t-il de si hypno-rémanent qui plaît tant chez Koons, pour qu’on l’expose encore grandement (Mucem, Marseille, collection Pinault, of course), qu’on parle tant encore de lui (artpress, partout, etc.) ? On va le voir, je suppose qu’il y a quelque chose de profondément régressif chez Koons, qui doit toucher à l’inconscient de certains, les (re)plongeant dans une espèce de joie infantile durant laquelle on tripote autant les organes excrémentiels que les jouets que l’on met en bouche. Et cette régression hypno-rémanente, nous allons encore en avoir la preuve avec le “dire” koonsien, finalement quasi identique à celui des années 1980, quand il visualisait des parties sexuelles mâle/femelle dans des aspirateurs (ici), sauf qu’avec le temps, bien entendu, Koons a peaufiné très amplement sa storytelling, capable de bondir et rebondir tel un marsupilami conceptuel de foire, et bien malin qui peut le suivre tant il brouille les pistes, comme un vieux sioux qu’il n’est pas. Mais, les écrivains étant fils de Thot, le Dieu-Babouin égyptien inventeur de l’écriture, ce n’est pas aux vieux cynocéphales qu’on apprend les grimures.

Jeff Koons, “Balloon Dog”, 1994-2000, acier inoxydable, 307,3 × 363,2 × 114,3 cm

J’ai extrait les phrases édifiantes d’un entretien trouvable en son entier ici 

Questions d’Anaël Pigeat (en très grande forme)

Réponse de Jeff (très en forme)

Pausons. Pigeat commence par une double question. Le Balloon Dog, jouet ou guerrier ? Dualité?  Koons répond que cette dualité est très importante, sauf qu’il va partir dans un autre sens, voire, un multi-sens. 1) Koons voulait un truc connecté à notre mémoire biologique, l’ADN… Soit. Le Balloon Dog (ci après BD) a une membrane ; “comme nous”. Ah oui ! On commence déjà à pouvoir s’identifier. Mais la dualité, qu’en est-il ? Ah ! Le “dialogue entre l’intérieur et l’extérieur”. Mais 2) le BD peut aussi être un objet trivial festif (?). OK. Mais, 3) on pourrait tout à fait supposer que BD est fait d’intestins. Ah bon ? Oui, BD « vient de nous, de notre corps ». Ouh là… ­4) On peut aussi voir là comme une idole antique… Notez, je vous prie, que Koons désigne les hommes de l’Antiquité comme des « primitifs », ce qui est tout de même assez déplacé, tant historiquement que géographiquement, si le terme «primitif»  a jamais signifié quoi que ce soit de pertinent (soyons un peu woke). Donc, Tonton Jeff nous propulse dans l’Antiquité, avec les primitifs. OK ? Vous visualisez la scène ? Les Primitifs repèrent leur « proie », et ils remarquent que des gaz se propagent… dans « les intestins et l’estomac ». Du coup, fascinés qu’ils sont par cette propagation gazeuse, voilà qu’ils façonnent une statue exactement comme Balloon Dog ! Sentez-vous le génie uchronique de Koons ? Depuis les entrailles des primitifs de l’Antiquité, il produit, en acier, une statue votive tout droit sortie de la fascination des primitifs pour les gaz et pestilences ! En quelques minutes, nous serons passés d’un “jouet d’enfant” à une statue totémique chez les primitifs de l’Antiquité réactualisée dans le présent le plus contemporain ! C’est étourdissant. C’est du TGNQ, du Très Grand N’importe Quoi. Mais ça passe, Pigeat (critique d’art ?) boit du petit lait. Voyez-vous ? Il y a, quasiment toujours chez Koons, quelque chose qui ne peut pas ne pas revenir, en tant que, chez lui, retour du réel : les gaz, le corps, les excrétions, une espèce de stade anal attardé (distinction claire entre objet interne et objet externe, définit-on, nous y sommes).

Question de Pigeat :

Answer

Bon! là, Jeff ne répond pas même à la question ; il poursuit sa grande métaphore organique. Voilà que, par sa taille, BD pourrait provenir de nous. Décidément ! il y a des liens insoupçonnés entre nous, les humains, et Balloon Dog. Et voilà qu’il peut nous éclairer sur ce que signifie un être humain. Diantre ! Fichtre ! Ça y est, nous sommes en pleine et profonde philosophie métaphysique. Balloon Dog m’éclaire sur ma condition d’être humain. Je vois ! J’ai compris ! Je n’ai rien compris. Je suis perdu, quant à moi, étourdi, et dois pondérer tout cela, cette pluie de savoir et d’illuminations. Il va me falloir du temps pour accéder au satori, qui me fera voir à quel point, BD et nous, les humains, sommes semblables !

 


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Léon Mychkine